poèmes
    

Aloysius Bertrand
sa vie, son oeuvre

Un poème au hasard


 
La salamandre

Il jeta dans le foyer quelques
frondes de houx bénit, qui brûlèrent en
craquetant.
Ch. NODIER. - Trilby.


- « Grillon, mon ami, es-tu mort, que tu demeures sourd au
bruit de mon sifflet, et aveugle à la lueur de l'incendie? »

Et le grillon, quelques affectueuses que fussent les paroles de
la salamandre, ne répondait point, soit qu'il dormît d'un magique
sommeil, ou bien soit qu'il eût fantaisie de bouder.

« Oh! chante-moi ta chanson de chaque soir dans ta logette de
cendre et de suie, derrière la plaque de fer écussonnée de trois fleurs
de lys héraldiques! »

Mais le grillon ne répondait point encore, et la salamandre
éplorée tantôt écoutait si ce n'était point sa voix, tantôt bourdonnait
avec la flamme aux changeantes couleurs rose, bleue, rouge, jaune,
blanche et violette.

« Il est mort, il est mort, le grillon mon ami! » Et j'entendis
comme des soupirs et des sanglots, tandis que la flamme, livide
maintenant, décroissait dans le foyer attristé.

« Il est mort! Et puisqu'il est mort, je veux mourir! » Les
branches de sarment étaient consumées, la flamme se traîna sur la
braise en jetant son adieu à la crémaillère, et la salamandre mourut
d'inanition.

Gaspard de la nuit

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